lundi 29 juin 2015

THUNDERCAT - FUNK DU FUTUR

Le petit génie virtuose de la basse repéré aux côtés de Flying Lotus, Kendrick Lamar ou Kamasi Washington revient avec un mini-album surprise et porte à un degré d'accomplissement inattendu sa mixture ensorcelante de soul funk jazz planant et sensuel.




"Sideman solaire, Steve Bruner, dit Thundercat, ne se contente plus de l’ombre. L’architecte de l'incontournable To Pimp a Butterfly de Kendrick Lamar (lequel considère le bassiste-vocaliste comme le «plus grand génie»qu’il connaisse) a délivré sans préavis un «mini-album» la semaine dernière, distribué en ligne par Brainfeeder, label de l’influent beatmaker Flying Lotus, avec qui il forme depuis plusieurs années un duo fusionnel.Par sa brièveté (six titres en une quinzaine de minutes) et ses limites conceptuelles, The Beyond / Where the Giants Roams s’apparente à un EP, comparé à la richesse des deux précédents albums solos du jazzman électrique, dont le dernier, Apocalypse, date de 2013. Cette livraison inattendue est avant tout un manifeste, une déclaration d’intention, établissant la position centrale de Thundercat, 30 ans, dans la scène afrofuturiste de Los Angeles, labo d’un jazz mutant mais vivant, dopé à l’electro, à la weed et au g-funk, traçant un pont entre Sun Ra et J-Dilla.

Pur angeleno élevé entre Compton et Watts par un père batteur chez Diana Ross, le versatile Steve Bruner jouit depuis une décennie d’une flatteuse réputation de musicien de studio polymorphe, trimballant son oreille absolue du skate-punk de Suicidal Tendencies à la néo-soul d’Erykah Badu, jusqu’au gangsta-rap de Snoop Dogg. Mais c’est à la suite de sa rencontre avec Flying Lotus, biberonné comme lui aux mangas et au jazz fusion, que Bruner va se faire un nom en tant que Thundercat. Sur Cosmogramma(2010), premier succès critique de son acolyte, au-delà de son assise rythmique et de ses solos acrobatiques, c’est le falsetto astral et la science de l’harmonie de Bruner qui retiennent l’attention. Des qualités que l’on retrouve sur The Beyond…, où il a fait le choix de la sobriété.


Virtuose décomplexé de l’école pyrotechnique et métallique à la Stanley Clarke, Bruner délaisse ici les cavalcades étourdissantes à travers le manche de sa basse six cordes pour des arpèges entêtants doublés d’hypnotiques ostinatos. Objectif : la transe.


Marqué par le deuil de plusieurs proches, «décédés ces dernières années dans des circonstances incroyablement brutales»comme Thundercat l’a expliqué sur Twitter, il creuse la veine songeuse de ses ballades psyché plutôt que le funk fétard de ses débuts. Il privilégie désormais un groove évanescent, porté par son chant de chaman perforant les différentes couches de basse et les nappes de claviers, mixées comme autant de volutes de fumée par Flying Lotus, crédité en tant que coproducteur. Après une introduction-incantation presque a capella, un crescendo de bruitages de science-fiction amorce le décollage cosmique. Pièce centrale de cette amuse-bouche, Them Changes et son imparable groove à bulles, une sucrerie douce-amère que n’aurait pas reniée George Duke. On regrettera juste la contribution trop anecdotique, bien que hautement symbolique, du monstre sacré Herbie Hancock sur un des morceaux."  Libération




La page officielle de Thundercat chez Brainfeeder / Ninja Tune

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